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pendant la guerre du Péloponèse ; on voyait affichés au coin des rues: Le Siège de Thionville. La Mère de
famille sauvée des flammes. Le Club des Sans-Soucis. L'Aînée des papesses Jeanne. Les Philosophes
soldats. - L'Art d'aimer au village. Les Allemands étaient aux portes ; le bruit courait que le roi de Prusse
avait fait retenir des loges à l'Opéra. Tout était effrayant et personne n'était effrayé. La ténébreuse loi des
suspects, qui est le crime de Merlin de Douai, faisait la guillotine visible au-dessus de toutes les têtes. Un
procureur, nommé Séran, dénoncé, attendait qu'on vînt l'arrêter, en robe de chambre et en pantoufles, et en
jouant de la flûte à sa fenêtre. Personne ne semblait avoir le temps. Tout le monde se hâtait. Pas un chapeau
qui n'eût une cocarde. Les femmes disaient: Nous sommes jolies sous le bonnet rouge. Paris semblait plein
d'un déménagement. Les marchands de bric-à-brac étaient encombrés de couronnes, de mitres, de sceptres
en bois doré et de fleurs de lys, défroques des maisons royales ; c'était la démolition de la monarchie qui
passait. On voyait chez les fripiers des chapes et des rochets à vendre au décroche-moi-ça. Aux Porcherons
et chez Ramponneau, des hommes affublés de surplis et d'étoles, montés sur des ânes caparaçonnés de
chasubles, se faisaient verser le vin du cabaret dans les ciboires des cathédrales. Rue Saint-Jacques, des
paveurs, pieds nus, arrêtaient la brouette d'un colporteur qui offrait des chaussures à vendre, se cotisaient et
achetaient quinze paires de souliers qu'ils envoyaient à la Convention pour nos soldats. Les bustes de
Franklin, de Rousseau, de Brutus, et il faut ajouter de Marat, abondaient ; au-dessous d'un de ces bustes de
Marat, rue Cloche-Perce, était accroché sous verre, dans un cadre de bois noir, un réquisitoire contre
Malouet, avec faits à l'appui et ces deux lignes en marge: " Ces détails m'ont été donnés par la maîtresse de
Sylvain Bailly, bonne patriote qui a des bontés pour moi. Signé: MARAT. " Sur la place du Palais-Royal,
l'inscription de la fontaine: Quantos effundit in usus! était cachée par deux grandes toiles peintes à la
détrempe, représentant l'une, Cahier de Gerville dénonçant à l'Assemblée nationale le signe de ralliement des
" chiffonnistes " d'Arles ; l'autre, Louis XVI ramené de Varennes dans son carrosse royal, et sous ce carrosse
une planche liée par des cordes portant à ses deux bouts deux grenadiers, la bayonnette au fusil. Peu de
grandes boutiques étaient ouvertes ; des merceries et des bimbeloteries roulantes circulaient traînées par des
femmes, éclairées par des chandelles, les suifs fondant sur les marchandises ; des boutiques en plein vent
étaient tenues par des ex-religieuses en perruque blonde ; telle ravaudeuse, raccommodant des bas dans une
échoppe, était une comtesse ; telle couturière était une marquise ; madame de Boufflers habitait un grenier
d'où elle voyait son hôtel. Des crieurs couraient, offrant les " papiers-nouvelles ". On appelait écrouelleux
ceux qui cachaient leur menton dans leur cravate. Les chanteurs ambulants pullulaient. La foule huait Pitou,
le chansonnier royaliste, vaillant d'ailleurs, car il fut emprisonné vingt-deux fois et fut traduit devant le
tribunal révolutionnaire pour s'être frappé le bas des reins en prononçant le mot civisme ; voyant sa tête en
danger, il s'écria: Mais c'est le contraire de ma tête qui est coupable! ce qui fit rire les juges et le sauva. Ce
Pitou raillait la mode des noms grecs et latins ; sa chanson favorite était sur un savetier qu'il appelait Cujus, et
dont il appelait la femme Cujusdam. On faisait des rondes de carmagnole ; on ne disait pas le cavalier et la
dame, on disait " le citoyen et la citoyenne ". On dansait dans les cloîtres en ruine, avec des lampions sur
l'autel, à la voûte deux bâtons en croix portant quatre chandelles, et des tombes sous la danse. On portait des
vestes bleu de tyran. On avait des épingles de chemise " au bonnet de la liberté " faites de pierres blanches,
bleues et rouges. La rue de Richelieu se nommait rue de la Loi ; le faubourg Saint-Antoine se nommait le
faubourg de Gloire ; il y avait sur la place de la Bastille une statue de la Nature. On se montrait certains
passants connus, Chatelet, Didier, Nicolas et Garnier-Delaunay, qui veillaient à la porte du menuisier Duplay
; Voullant, qui ne manquait pas un jour de guillotine et suivait les charretées de condamnés, et qui appelait
cela " aller à la messe rouge " ; Montflabert, juré révolutionnaire et marquis, lequel se faisait appeler
Dix-Août. On regardait défiler les élèves de l'Ecole militaire, qualifiés par les décrets de la Convention "
aspirants à l'école de Mars ", et par le peuple " pages de Robespierre ". On lisait les proclamations de Fréron,
dénonçant les suspects du crime de " négotiantisme ". Les " muscadins ", ameutés aux portes des mairies,
raillaient les mariages civils, s'attroupaient au passage de l'épousée et de l'époux, et disaient: " mariés
municipaliter ". Aux Invalides les statues des saints et des rois étaient coiffées du bonnet phrygien. On jouait
aux cartes sur la borne des carrefours ; les jeux de cartes étaient, eux aussi, en pleine révolution ; les rois [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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